
Donatello, il Rinascimento
Cœur battant du laboratoire florentin, Donatello invente un langage humaniste parmi les plus féconds du Quattrocento. Présentée cet été à Florence, l’exposition Donatello, il Rinascimento lui reconnaît sa valeur. Elle fera escale à Berlin à l’automne, puis à Londres en 2023.
De la scène de Saint Georges et le dragon[1] jusqu’aux chaires de San Lorenzo, réalisées dans les années 1460, Donatello explore plusieurs manières d’utiliser quelques millimètres d’épaisseur à peine, pour creuser la profondeur, introduire le mouvement et travailler l’expressivité. Le sculpteur se fait presque dessinateur mais le graphisme reste indissociable des effets de lumière sur la texture du marbre ou du bronze doré. La virtuosité du ciseau démarque son travail de la peinture.
Autre révolution « donatellesque » : l’intégration de la perspective, une invention initialement théorisée par son aîné et ami Brunelleschi et destinée aux peintres, pour construire un espace mental et commensurable. Comme l’explicitent le catalogue et l’exposition elle-même, c’est paradoxalement un sculpteur, celui-ci et pas un autre, qui a été le tout premier passeur de cette méthode géométrique en peinture ! Donatello en a fait une étonnante diversité d’usages, au-delà de la symétrie et du point de fuite mono-focal. Parce qu’il pense toujours ses œuvres in situ, attentif à l’inclusion et la proximité avec le spectateur. Au Banquet d’Hérode [1], le point de vue surplombe très légèrement le sol et la table du festin au premier plan, puis se redresse dans deux arrière-plans, le spectateur est ainsi intégré au cœur du drame. La Madone dite Pazzi[2] s’inscrit dans un carré quasi-parfait à angles droits, mais l’encadrement de marbre déplace le point de fuite en léger « sotto in sù ». Aux portes de San Lorenzo, l’espace dépend cette fois du plan horizontal sur lequel deux personnages viennent saillir, la crédibilité de la profondeur repose sur le seul contraste entre la surface vide au centre et les figures latérales. Les lignes et la géométrie mathématique insufflent une amplitude nouvelle aux bâtis architecturaux comme aux paysages. A l’intérieur ou à l’appui de ce cadre rigoureux, il libère le mouvement et une expressivité de plus en plus criante.
[1] 1423-1427, Baptistère de la cathédrale de Sienne
Illustration : Vierge à l'enfant, dite Madone Pazzi, Vers 1445, Bode Museum, Berlin
[1] Commandé par la confrérie des armuriers, Orsanmichele, Florence